26 octobre 2025

De la dynamique des corps

Enfant, j'ai vécu en face d'un garage automobile percé dans le rempart de la ville sous la forme d'un tunnel que mes yeux de jadis trouvait fort sombre et long. Deux frères mécaniciens y réparaient les modèles dépourvus de concessions officielles au chef-lieu du département, et c'est ainsi que j'ai passé des heures à bader des marques aujourd'hui disparues qui faisaient encore la fierté de la France, bien qu'elle ait perdu la guerre que les Américains avaient gagnée pour nous.

Les plus fréquentes étaient les Aigles à gros phares de Chenard Walcker qui reprenaient les codes esthétiques de la Ford V8 d'avant-guerre, les imposantes Panhard Levassor à volant central et moteur américain qui fumait bleu, les Hotchkiss Anjou toujours noires à boîte électrique, les Salmson S4 aux ailes joufflues avec un moteur bizarre construit en double culasse. Je suis monté une fois dans une Talbot Lago Baby deux-portes à tomber par terre, avec le siège si bas que je ne voyais pas le long capot. Les vitesses se présélectionnaient et on les engageait à la pédale, m'avaient-ils expliqué. D'après les deux frères, dont j'ai perdu le nom hélas, le critère de qualité d'une automobile était de pouvoir se conduire à cent à l'heure avec une seule main en haut du volant.
Sinon la ville était inondée (déjà) de Renault KZ, Primaquatre, Vivaquatre, Juvaquatre et Frégate, Vedette et Aronde Simca, Rosalie Citroën (à moteur flottant) et Traction avant, de Peugeot 201, 202, 402 et 203, et une petite six-cylindres Rosengart (LR64), celle de mon père. Mais les jours de foire, il y avait encore beaucoup d'attelages à chevaux qui venaient des alentours. Et puis c'est tout ! Le grand Legrand de Souyri venait à pied se fournir au magasin et repartait de même, chargé comme une mule pour deux heures.

Quand on parlait "voiture" à table, les marques à rêver étaient toujours Hispano, Delage, Bugatti, Delahaye, Voisin et finalement Rolls, mais on n'en voyait jamais. Le Plan Pons de réindustrialisation (clic) allait les détruire (pour celles qui avaient survécu à la grande crise et à la guerre) en dirigeant les ressources métallurgiques vers les modèles populaires et le charroi. Le marché de masse ne leur correspondait plus. Toutes les tentatives ultérieures de remonter en gamme échoueront, que ce soit Facel Vega, SM, Monica, Venturi. En fait, la France avait perdu ses motoristes et cette pénurie est irrémédiable.
Faute de moteur moderne en développement, la DS Citroën sortira avec le vieux tourne-broche de la Traction avant. Peugeot montera des arbres à cames latéraux sur ses modèles jusqu'à la 505. Citroën voudra économiser un nouveau moteur pour sa SM hyper-technologique en prenant le moteur en cristal de roche chez Maserati qu'ils venaient de racheter à la famille Orsi ; ce moteur fragile coulera la réputation d'une voiture extraordinaire. Peugeot et Renault-Volvo créeront de toute pièce un V8, raccourci en V6 par le choc pétrolier (le PRV), qui manquait de couple sous carburateurs et buvait en litres son chiffre en chevaux fiscaux. Il faudra attendre 1997 pour voir arriver sous les capots français un vrai moteur V6 doubles arbres et 24 soupapes avec le couple qui va bien et une consommation maîtrisée, mais ça ne pouvait pas être parfait - le chat noir était toujours là ; primant le coût, cet excellent moteur ESL Renault-Peugeot fut monté en position transversale compliquant et renchérissant son entretien. En long, ce moteur écrasait la concurrence. Puis viendra le downsizing général, qui risque bien de tuer nos marques si les actions collectives aboutissent en justice contre ces moteurs de mobylette martyrisés par des turbocompresseurs aux frais du client.

Il y a enfin un défaut d'image incompréhensible quand on connaît la qualité des châssis français et leur toucher de route inégalé. Il faut gagner des courses comme au début du XXè siècle pour nourrir la notoriété, la recette n'a pas changé, et pour ce faire, il y faut des moteurs. Les passionnés ont disparu des états-majors, ne restent que les cost-killers et les directeurs financiers omnibulés par le cours de bourse. Prenons l'exemple de la 407 (clic) :
Sur un châssis de piste avec doubles triangles avant à pivot découplé, ils ont monté sous un long capot très flatteur pour le loup de Tex Avery, un transversal (?!) et comme moteur de milieu de gamme (donc le plus vendu) un 2L poussif, peu en rapport avec le poids élevé du véhicule. La Grande Armée renverra ceux qui s'en plaindront au nouveau V6 plus cher. Les clowns de Top Gear feront une émission spéciale sur ce modèle raté avant même de savoir qu'il était en plus très copain avec le chef d'atelier de la concession de secteur. Ne parlons pas du coupé maison dérivé en plus moche, avec des louvers factices d'aération des freins. Fallait oser !

Mais pourquoi je vous bassine avec la dynamique mécanique des corps ? Parce que leur production est emblématique de la position d'un pays dans l'économie du monde. Nous fûmes avec nos trois cousins anglais, allemands et italiens à la naissance de l'automobile et de son amélioration continue. Jusque dans les années 50, tout ce qui se montait sur une voiture n'importe où dans le monde, Etats-Unis compris, provenait d'un concept développé par la bande des quatre. L'envolée phénoménale de l'industrie américaine hyper-rationnalisée de l'entre-deux-guerres ne changea pas cette hégémonie de l'ingénierie européenne pas plus qu'elle n'entama les volumes de production du vieux continent... jusqu'à ce que la pollution s'en mêle.

Le cycle de combustion à quatre temps c'est Beau de Rochas ; la batterie au plomb, Gaston Planté ; le carburateur, Fernand Forest ; le moteur V8, De Dion Bouton ; les pneumatiques gonflés, les frères Michelin ; le moteur à quatre temps de Rochas, Gottlieb Daimler ; les roues motrices directrices, Georges Latil ; la boîte à train épicycloïdal à présélection (qui sera développée par le major Wilson pour les gros couples), Marcel Viratelle ; la boite de vitesses à prise directe, Louis Renault (inventeur du char FT); la transmission automatique, Gaston Fleischel ; le moteur surcompressé, Rudolf Diesel ; le refroidissement par air, Alexis de Bischop ; le refroidissement par eau, Samuel Brown etc. etc. les Américains surent copier (et voler), comme les Japonais bien plus tard.

Après avoir tenté de guérir le moteur thermique de ses effluves par maints subterfuges comme le GPL et l'éthanol, il a fallu se décider à revenir à la traction électrique (salut, Jénatzy !). Après moult précautions prises en vertu du principe constitutionnel de précaution, par aussi l'appréhension atavique des élites européennes de la prise de risque et par le défaut de surplomb qui nous aurait révélé que l'affaire commençait par les terres rares, le lithium, les batteries embarquées, et surtout faute d'avoir distrait suffisamment de milliards pour financer cette grande reconversion, nous sommes sortis de notre champ d'expertise. Pendant ce temps, la jeune industrie automobile chinoise y est allée de bon cœur, à fond !
Notre marché est aujourd'hui pris d'assaut par les marques électriques chinoises qui, au prix d'une concurrence féroce sur leur marché domestique, proposent des modèles d'avant-garde, attractifs et parfaitement au point. Ce qui était impensable il y a cinq ans, quand on les défiait de passer les tests européens, s'avère imparable. Le tsunami, si redouté à l'époque de l'invasion japonaise d'autos mieux construites que les nôtres, déferle maintenant depuis la Chine populaire.

Que cela signifie-t-il ? Non pas que nous sommes largués, mais que nous sommes à la traîne, handicapés pour tout changement de bord par la frilosité de l'industrie trop encline à l'assistance publique, par la politique des compromis et du juste retour électoral. Et plus généralement parce que notre pays est sous-capitalisé : à force de pointer du doigt le succès et les signes extérieurs de ce succès, le succès est parti se faire admirer loin des envieux et des égalitaristes de la gauche improductive. Il y a de belles réussites françaises à l'étranger ; on ne les cite pas, ce serait du "french bashing" et de toute façon elles restent discrètes - chat échaudé !
A l'inverse, il y a aussi de belles réussites chez nous de firmes étrangères qui nous suggèrent que tout n'est pas fichu si nous voulons nous y mettre pour de vrai, sans attendre l'Etat impotent et jaloux, débroussailler la jungle des contraintes et stigmatiser l'ingérence de la technocratie castratrice. Il n'est pas innocent de constater que la première usine automobile française en termes d'unités tombées des chaînes est l'usine Toyota de Onnaing (Valenciennes). Elle a déjà vingt-cinq ans et a produit cinq millions de Yaris prisées des consommateurs. Ne faisons pas la liste des usines fermées ou reconverties qui accompagne le repli de notre industrie générale. Pour assembler quoi que ce soit ici, nous faisons fabriquer... ailleurs, en bénéficiant heureusement du marché commun.
Et nous ne parlerons pas des associations écologistes qui au moindre projet de chantier industriel ameutent contre lui ses voisins et au-delà, contre ses "nuisances" diverses et variées, si les mêmes qui pétitionnent pour des sous ne refusent pas l'emploi forcément dégradant !

Notre atout fondamental est que nous, Européens, savons encore tout faire et que notre créativité est intacte. Notre aéronautique le prouve, nos fusées Ariane, nos sous-marins à propulsion nucléaire aussi. C'est la liberté d'innovation qui pêche et la pusillanimité des banquiers qui freine les bonnes idées qui partent. S'y ajoute le lest de l'Etat normatif qui ne comprend pas qu'on puisse un jour vouloir se passer de lui. Même mort, il nous fera ch... Parlez librement avec un énarque, un X-Mines ou Pont, même avec un petit techno de SciencesPo, ils vous expliqueront tout ce qu'ils peuvent faire ou ne pas faire pour vous, sans jamais douter une minute que vous ayez recherché leur concours. A la question de savoir comment faire sans eux, ils resteront cois, au seuil de l'angoisse existentielle.

Sans verser dans le libertarianisme de l'Ecole de Vienne (même s'il faut avoir lu ces gens), on peut questionner l'action de l'Etat dans le domaine économique sur les cent dernières années. Le game-changer ce n'est jamais lui ! Si la noblesse républicaine avait l'étincelle de se replier sur le domaine régalien en s'appliquant à y être irréprochable, et si elle abandonnait l'économie aux forces de production, je crois qu'à l'issue d'une cure de désintoxication sociale, nous nous porterions mieux... et serions même capables bientôt de commencer à rembourser la dette honteuse que l'Etat invasif a mis sur la tête des générations montantes pour financer le hamac social et l'armée mexicaine de la fonction publique, celle qui s'est fait voler les bijoux de la couronne.

L'automobile fut la seule vraie victoire de l'Anarchie avec un grand "A". Quand elle aura disparue, pour des tas de bonnes et mauvaises raisons, on s'apercevra de la liberté inouïe qu'elle a apportée à l'époque moderne ; liberté anti-citoyenne pour la bien-pensance de gauche qui veut de toujours et plus encore demain transporter les gens dans un système collectif à sa merci. Dans le roman 1984 de George Orwell il n'y a pas d'automobiles. Peut-on finir sur un vœu ?
On me dit non dans l'oreillette. Ce sera pour une prochaine fois.

Roulez bolides !

ALSP !

19 octobre 2025

L'Etat répare votre grille-pain !

Votre lave-vaisselle, le four à micro-ondes, l'aspirateur balai et son compère le traîneau, jusqu'à votre pétain de télé ! Peuple assisté du berceau à la tombe, dénervé ! No comment ?

Des nations fières ont repris sur leurs armes des animaux dominants et impériaux, lions, léopards, ours, loups, parfois bruyants comme le coq ou grands saigneurs comme l'hermine. La nation française va adopter le lemming. C'est assez bête un lemming, même s'il ne saute pas de la falaise comme Walt Disney voulait nous le faire croire. Mais un animal bête nous va bien. Quand on est stupide sur le régime général de pensions déficitaire et sur l'inondation des subventions publiques jusqu'à déporter la banqueroute au débit de nos enfants, on ne peut être intelligent sur le reste.
Mieux, au concours du peuple le plus con de la terre, nous avons des chances accrues inversement proportionnelles au classement Pisa et à l'âge de départ à la retraite. Les agences de notation ne s'y trompent pas qui dégradent lentement le crédit de l'Etat francais, lentement pour ne pas créer une vague scélérate sur le marché des bons. Que disent dans le confinement de leur bureau calfeutré les Credit Managers à leurs clients ? Peut-être que les faux-semblants de la banqueroute à la grecque se mettent en place, derrière la BCE pour commencer, puis derrière le FMI, juste de quoi suggérer qu'il y a mieux à faire que la dette française comme souci.

Avez-vous lu la réaction du ministre des Finances ? C'est ici. Il porte un jugement moral sur la "lucidité", le "sérieux" à trouver, la "responsabilité" questionnée. Alors que nous avons deux millions d'allocataires non cotisés dans les comptes et un Etat millefeuille qui retient la crème de la dépense publique. Le vrai foutage de gueule est de mettre sur les tables du parlement un budget primaire en déficit avant service de la dette. Une dette contractée pour payer fonctionnaires et pensions chaque mois et non pour investir ; parfaite définition du tonneau de Danaïdes. L'Italie a un budget primaire en excédent : ils sont fous ces Romains !

La réponse devrait être de couper dans les prestations sociales exagérées, les subventions, les agences, commissariats, autorités, fromages népotiques, et supprimer la gabegie des redondances administratives jusqu'à équilibrer le budget primaire. Mais à 30% de pertes, c'est les abysses (le 5%Pib est une commodité de communication pour ne pas faire entrer le vrai chiffre dans le cerveau des gens). Pour juguler ça, il en faut dans le pantalon afin d'affronter et de vaincre l'insurrection attisée par les partis de la dépense à outrance à compte d'autrui.

L'autre moment fort de la période, c'est à mon avis le renouvellement pour six ans du partenariat entre la Maison Chanel et le Centre Scientifique de Monaco pour soutenir la recherche fondamentale et appliquée aux coraux rouges. L'intelligence artificielle gratuite nous dit que « ce programme, lancé en 2019, a permis des avancées significatives, notamment la naissance de deux cent cinquante nouvelles colonies de corail rouge dans les eaux monégasques en octobre 2024, marquant une étape clé dans les efforts de restauration écologique. Le partenariat CSM-Chanel, initialement prévu pour six ans, a été prolongé jusqu'en 2031, renforçant l'engagement commun pour la protection de cette espèce emblématique menacée par la surpêche, la pollution et le changement climatique. Les recherches se concentrent sur la biologie, la croissance (2 à 8 mm par an) et la reproduction du corallium rubrum, notamment grâce à des expériences en grottes artificielles à 30-40 mètres de profondeur, qui ont révélé des mécanismes inédits comme la fécondation à distance de plus de 15 mètres. En 2024, le corail rouge a été au cœur des discussions scientifiques lors du 43e Congrès de la CIESM, où les résultats du programme ont été présentés ».

Les sociétés à forte réputation comme la SAS Chanel des frères Wertheimer, doivent distraire une part significative de leur résultat net pour le mécénat des causes dans le vent. La Maison Chanel subventionne des musées par son Culture Fund et la Prince's Fundation du roi Charles III d'Angleterre. Il est bienvenu qu'elle s'intéresse aux coraux rouges emblématiques de la joaillerie méditerranéenne. C'est aussi une sorte de legs de Karl Lagerfeld (†2019) qui fut toujours proche de la famille Grimaldi. Ceci étant acté, il nous faut conclure.

En beauté ! Par le tunnel de Béring. Si les soixante-dix milles nautiques de foration ne posent pas de problème insurmontable - c'est le tunnelier qui travaille - les voies d'approche comme la (sur)vie du chantier de surface en convoquent pas mal à cette latitude. Le promoteur russe table sur huit milliards de dollars, je crois qu'il les enfume. Mais d'autres projets s'en trouveront encouragés comme le tunnel de Gibraltar qui désenclaverait définitivement le Maroc.
Le projet vient à point pour réchauffer les relations russo-américaines, il est grandiose, à la mesure de l'ego de Donald le Dingue, mais il ne lui reste que trois ans et ce sera trop court pour couper le ruban dans le blizzard alaskaien.
Plus par ici !

Il y avait aussi quelques millions d'Américains dans les manifestations "NoKings", le tournez-manège des tomahawks - un coup je te vois, un coup je te vois pas - l'insulte de Budapest, la cagade malgache de Macron et la purge dans les états-majors chinois, le casse du Louvre, sans oublier l'incarcération très médiatisée d'un innocent pour association de malfaiteurs en lien avec la riche et défunte Jamahiriya libyenne. Hannibal Kadhafi va être libéré à Beyrouth, il sait.

ALSP !

12 octobre 2025

Autonomes !

Comment éviter de parler du spectacle de blattes en folie que nous propose la classe politique française ? Et pourtant c'est ce que nous allons faire tant il est douloureux d'accepter que nous soyons devenus un peuple de pitres ! Même pas ! De connards invétérés. A l'heure où nous parlons, et à la même heure demain et toute la semaine qui vient, le mois entier, jusqu'après la Noël, Pâques et la Trinité, la dette souveraine du pays augmente, parce que toute idéologie politique ayant quelque chance d'obtenir des cocardes tricolores est fondée sur la dépense publique. Et nous voyons se former en ville des cortèges réclamant de dépenser plus !!! De parfaites andouilles !

Noli foras ire, in te redi, in interiore homine habitat veritas* disait Augustin d'Hippone, le seul Algérien vraiment intelligent avant Zinedine Zidane. Il déclarait la guerre à l'hétéronomie prônée par les docteurs de la loi et nous conjurait d'entrer à l'intérieur de nous-mêmes pour trouver la Lumière. C'est exactement ce que la caste savante nous refuse, elle qui inonde le marché socio-politique de sommes épaisses de "prêt-à-penser" dispensant le vulgum pecus de réfléchir. Méditez, que diable ! Ecoutez des musiques de méditation, des mélodies celtiques, le Om tibétain sinon, hors du bruit et du tempo, achetez des bougies parfumées, des cierges. Avancez vers l'autonomie, ce péché dénoncé par toutes les autorités d'asservissement des âmes. Soyez vous-mêmes et évadez-vous de la case dans laquelle la physique sociale vous a enfoncés. Alors quand on verse au fumier les idées en vogue que risque-t-on de découvrir en soi ?
(*) Ne te perds pas au dehors, entre en toi-même, c'est à l'intérieur de l'homme qu'habite la vérité.


Les évidences !

Celles de la nature d'abord.
Elle ne fait pas de "sauts" et se plaît à la diversité, elle cultive l'impermanence uniquement sur le temps long. Qu'est-ce à dire ? Que la révolution des sociétés provoquée par les hommes est du domaine de l'atopos, contre-naturel, moralement stupide. Evacuez déjà les "révolutionnaires" en commençant par ceux en peau de lapin, puis intéressez-vous aux vrais, non pour vous en prémunir mais pour vous dire un jour : je me le disais bien ! et restez propres dans votre tête. Les vrais sont la nouvelle élite allumée du transhumanisme, idéologie puissante qui met à sa botte toutes les autres. Elle investit des milliards de dollars chaque année dans la biotech, l'intelligence artificielle pour résoudre le théorème de la mort. La grande tâche du monde moderne issu de la Renaissance est aujourd'hui de « transformer la mort d’une réalité de l’existence en un problème à résoudre » (Peter Thiel).
Etant acquis que tout problème, casse-tête, quadrature, énigme est soluble dans le pognon, ils déversent des sommes folles pour vaincre la nature et d'une certaine manière, Dieu. Et ils ont beaucoup avancé dans ce nouveau pacte faustien. La Nature va détester et trouvera la bonne fréquence pour pulvériser l'insulte si Dieu ne s'en mêle pas.

L'autre évidence est la typologie de l'être humain.
Le lectorat steppique connaît déjà cette typologie en poupées russes : le corps, vase de l'âme dirigée par l'Esprit. La méditation transcendantale à l'encens ayurvédique vise à conscientiser la combinatoire des trois états pour atteindre à la sérénité qui doit précéder la mort. Si philosopher c'est bien mourir, c'est aussi vivre sage en attendant. Le débat intime entre soi et la raison convoque tous les principes de l'ordre naturel qui convergent dans la vie si l'on observe les vertus éthiques qui doivent conduire notre espèce, la tempérance, la force alliée à la prudence, et la justice in fine. Le savetier comme le charbonnier peuvent y réfléchir à partir de leur propre ressenti. Et qu'obtiendront-ils que le bruit des idéologies politiques ne leur donnera jamais ? Au lieu de l'envie qui gouverne notre société de consommation, la sagesse, au sens de la signification de ce monde et de notre participation à l'aventure.

Aparté théologique : c'est la position de l'Esprit qui détermine la religion proférée. Est-il intérieur qu'il s'agit de l'intelligence superlative et immanente qui a pénétré notre intellect, le Noûs grec. Est-il extérieur et diffus dans toutes les manifestations de la nature qu'on approche alors du shintoïsme. Est-il loin dans une trinité en surplomb de Sa création qu'il s'agit alors d'une religion du Livre le personnifiant.
Fin de la séquence "philo du zinc". Garçon, remettez-nous ça ! Pour moi, un quatre-tiers !


A l'heure où nous mettons sous presse, le coquet aux pattes "Village" qui nous sert de chef d'Etat, est parti faire l'important en Egypte au secours de la victoire de Donald Trump qui résout la crise de Gaza, enfin, peut-être, mais tout le monde le souhaite. Il vous a échappé que ce lundi est le dernier jour selon la Constitution pour déposer la Loi de finances 2026 sur la table du Conseil des ministres présidé par vous savez qui. Mais de cela la Folle du château n'a rien à faire. Il lui faut être sur la photo sous le soleil des tropiques et délivrer un petit discours d'apparat que personne n'écoutera mais que les chancelleries enregistreront par routine diplomatique. Il grandira un peu, mais pas beaucoup depuis le four des silos de Beyrouth, jusqu'à dissolution prochaine en France de la chambre basse indisciplinée. Et tout recommencera, mais pas comme avant, en pire, bien pire ! La moule restera collée au bouchot quoiqu'il nous en coûte.

C'était un peu court, je m'en excuse.


Petite bibliographie :

- Philippe Filliot, Être vivant, méditer, créer (Actes Sud, Arles 2016)
- Pierre Hadot, Eloge de la philosophie antique (Allia, Paris 1998)
- Roland Barthes, L'ancienne rhétorique (Seuil, Paris 1985)


ALSP !

05 octobre 2025

Le sage de la montagne

En faisant la queue à la boulangerie, une ravissante cliente voyant mon âge canonique m'a proposé de la sauter dans la file, ce que j'ai refusé au motif que j'étais moins pressé qu'elle, et que si le contraire avait été, je me serais permis de lui en faire la demande en tout bien tout honneur, ce qui la fit sourire. Et la conversation s'engagea sur le désordre ambiant, l'insurrection rampante des catégories protégées de la solidarité nationale, le foutoir lui dis-je, la chienlit ? me répondit-elle. Pourquoi ? Parce que les chaînes d'information nous gavent avec les palinodies politiques entourant la recherche du gouvernement perdu, M. Lecornu tenant le manche pour quelques jours encore. Les rédactions dramatisent au maximum le moindre écart de langage, le plus petit étonnement, le combat des insectes : il faut outrer ou attendrir le citoyen connecté, afin que grimpe l'audience qui rémunèrera l'effort en pub ! Patrick Le Lay avait tout dit, nous n'y reviendrons pas.
- Et pour mademoiselle ce sera ?
- Oh pardon. Deux baguette-graines !
- Deux quatre-vingt !
- Bonne journée.
Elle s'enfuit aussitôt étant en double file, mais un coupé SLK de fille ça ne se verbalise pas.
Damned !!! j'allais juste l'inviter aux soirées philosophiques de la Crypte chez Charlotte Casiraghi !

Mais pour lui dire quoi qu'elle ne sache déjà ? L'antiparlementarisme a fait un grand bond en avant dans l'opinion au spectacle de la chambre impossible. On finira bien par se poser la question de la pertinence de cette représentation au gouvernement des hommes. C'est quoi ce vacarme ? On sait de longtemps que l'administration de base de ce pays repose sur les deux piliers de la préfectorale d'une part, des trésoriers-payeurs généraux de l'autre. Le reste est décoration, clientélisme et démagogie. Conservant les piliers précités qui ont fait leur preuves et assurent l'essentiel, on est autorisé à questionner le couvercle parlementaire de nos institutions sans attendre le 6 février 2026.

Que faire de tous ces bavards si on ne peut les brancher aux réverbères des Champs-Elysées ? Rien ! Ils ne savent rien faire ! S'ils en sont rendus à faire député c'est qu'ils n'ont marqué aucun essai dans la vraie vie, bien qu'ils soient bouffés par une ambition disproportionnée aux capacités requises. Quand on pense qu'ils obtiennent la pension de retraite de leur inutilité ! A se les mordre !

Revenir toujours aux fondamentaux, à nos philosophes de l'antiquité qui argumentaient dans le tumulte d'une concurrence féroce entre leurs écoles de pensée (payantes). Il fallait convaincre l'auditoire par le verbe, à l'instant, emporter le consensus de haute lutte et, seulement à l'aboutissement de la dispute philosophique, coucher la chose prouvée sur le parchemin pour une transmission future jusqu'à Alexandrie. Que nous disent-ils ces parchemins ? Que philosopher c'est rompre avec la vie quotidienne et engager l'esprit dans les arcanes de la Sagesse, de la Raison Universelle. Se placer en surplomb des contingences pour appréhender la morale de l'espèce et la mécanique de sa physique sociale. Comprendre pour décider. Proclamer la décision.
C'est bien cette dictature de la raison qui nous fait le plus défaut aujourd'hui, même si des intelligences supérieures appréhendent toutes les complications de l'horlogerie humaine. Mais sans action, sans exécution, ce capital intellectuel se perd comme l'oued au désert.

Notre nation est écrasée d'évidences qui la menacent jusqu'à lui promettre la ruine, mais qui donc prendra la Logique à bras le corps pour nous sauver de ce pronostic ? Personne dans la classe politique ! Regardez le niveau des interventions. C'est à pleurer ! D'aucun y penserait-il par surprise qu'il en ferait un livre à visée édifiante, mais pas un programme. La Raison est invendable sur les bancs des assemblées. La preuve nous en est fournie à chaque retransmission des débats parlementaires.

Les réactions politiques après l'annonce du nouveau gouvernement chargé de naviguer entre tous les périls sont affligeantes et irresponsables. Ecoutez-les pour bien comprendre que le député a le nez sur sa circonscription nourricière et sur les municipales où se testeront les combinaisons politiciennes. L'avenir du pays est un élément de langage parmi bien d'autres. La gamelle prime. Nous n'avons pas besoin de ces gens. Il n'existe pas de vrai programme de redressement du pays parce qu'il n'existe personne dans le champ politique disposant de l'autorité naturelle que procure la Sagesse. Sous des airs parfois avantageux et déterminants pour l'élection, ils sont finalement terriblement cons nos représentants, et le défi du premier ministre à leur laisser le dernier mot sans appliquer le 49.3 en matière budgétaire, vise à leur plonger le nez dans leur merde.

Au lieu de ce Barnum qui nous coûte une fortune et sans doute plus avec les indirectes, il nous manque le Sage de la montagne qui édicterait la loi juste et serait obéi sans reproches ni murmures (comme disait le maréchal Soult) parce qu'il maîtriserait toute la science de son art. Cela s'appelle une monarchie éclairée.

ALSP !


Postscriptum du lundi matin : Le Premier ministre Lecornu démissionne quatorze heures seulement après la validation de son gouvernement. Le motif en est l'exacerbation des logiques partisanes qui défendent les boutiques contre l'intérêt général et répondent à l'appel aux compromis de Matignon par une promesse de censure dès demain, après le discours de politique générale au Palais Bourbon. C Q F D !