05 octobre 2025

Le sage de la montagne

En faisant la queue à la boulangerie, une ravissante cliente voyant mon âge canonique m'a proposé de la sauter dans la file, ce que j'ai refusé au motif que j'étais moins pressé qu'elle, et que si le contraire avait été, je me serais permis de lui en faire la demande en tout bien tout honneur, ce qui la fit sourire. Et la conversation s'engagea sur le désordre ambiant, l'insurrection rampante des catégories protégées de la solidarité nationale, le foutoir lui dis-je, la chienlit ? me répondit-elle. Pourquoi ? Parce que les chaînes d'information nous gavent avec les palinodies politiques entourant la recherche du gouvernement perdu, M. Lecornu tenant le manche pour quelques jours encore. Les rédactions dramatisent au maximum le moindre écart de langage, le plus petit étonnement, le combat des insectes : il faut outrer ou attendrir le citoyen connecté, afin que grimpe l'audience qui rémunèrera l'effort en pub ! Patrick Le Lay avait tout dit, nous n'y reviendrons pas.
- Et pour mademoiselle ce sera ?
- Oh pardon. Deux baguette-graines !
- Deux quatre-vingt !
- Bonne journée.
Elle s'enfuit aussitôt étant en double file, mais un coupé SLK de fille ça ne se verbalise pas.
Damned !!! j'allais juste l'inviter aux soirées philosophiques de la Crypte chez Charlotte Casiraghi !

Mais pour lui dire quoi qu'elle ne sache déjà ? L'antiparlementarisme a fait un grand bond en avant dans l'opinion au spectacle de la chambre impossible. On finira bien par se poser la question de la pertinence de cette représentation au gouvernement des hommes. C'est quoi ce vacarme ? On sait de longtemps que l'administration de base de ce pays repose sur les deux piliers de la préfectorale d'une part, des trésoriers-payeurs généraux de l'autre. Le reste est décoration, clientélisme et démagogie. Conservant les piliers précités qui ont fait leur preuves et assurent l'essentiel, on est autorisé à questionner le couvercle parlementaire de nos institutions sans attendre le 6 février 2026.

Que faire de tous ces bavards si on ne peut les brancher aux réverbères des Champs-Elysées ? Rien ! Ils ne savent rien faire ! S'ils en sont rendus à faire député c'est qu'ils n'ont marqué aucun essai dans la vraie vie, bien qu'ils soient bouffés par une ambition disproportionnée aux capacités requises. Quand on pense qu'ils obtiennent la pension de retraite de leur inutilité ! A se les mordre !

Revenir toujours aux fondamentaux, à nos philosophes de l'antiquité qui argumentaient dans le tumulte d'une concurrence féroce entre leurs écoles de pensée (payantes). Il fallait convaincre l'auditoire par le verbe, à l'instant, emporter le consensus de haute lutte et, seulement à l'aboutissement de la dispute philosophique, coucher la chose prouvée sur le parchemin pour une transmission future jusqu'à Alexandrie. Que nous disent-ils ces parchemins ? Que philosopher c'est rompre avec la vie quotidienne et engager l'esprit dans les arcanes de la Sagesse, de la Raison Universelle. Se placer en surplomb des contingences pour appréhender la morale de l'espèce et la mécanique de sa physique sociale. Comprendre pour décider. Proclamer la décision.
C'est bien cette dictature de la raison qui nous fait le plus défaut aujourd'hui, même si des intelligences supérieures appréhendent toutes les complications de l'horlogerie humaine. Mais sans action, sans exécution, ce capital intellectuel se perd comme l'oued au désert.

Notre nation est écrasée d'évidences qui la menacent jusqu'à lui promettre la ruine, mais qui donc prendra la Logique à bras le corps pour nous sauver de ce pronostic ? Personne dans la classe politique ! Regardez le niveau des interventions. C'est à pleurer ! D'aucun y penserait-il par surprise qu'il en ferait un livre à visée édifiante, mais pas un programme. La Raison est invendable sur les bancs des assemblées. La preuve nous en est fournie à chaque retransmission des débats parlementaires.

Les réactions politiques après l'annonce du nouveau gouvernement chargé de naviguer entre tous les périls sont affligeantes et irresponsables. Ecoutez-les pour bien comprendre que le député a le nez sur sa circonscription nourricière et sur les municipales où se testeront les combinaisons politiciennes. L'avenir du pays est un élément de langage parmi bien d'autres. La gamelle prime. Nous n'avons pas besoin de ces gens. Il n'existe pas de vrai programme de redressement du pays parce qu'il n'existe personne dans le champ politique disposant de l'autorité naturelle que procure la Sagesse. Sous des airs parfois avantageux et déterminants pour l'élection, ils sont finalement terriblement cons nos représentants, et le défi du premier ministre à leur laisser le dernier mot sans appliquer le 49.3 en matière budgétaire, vise à leur plonger le nez dans leur merde.

Au lieu de ce Barnum qui nous coûte une fortune et sans doute plus avec les indirectes, il nous manque le Sage de la montagne qui édicterait la loi juste et serait obéi sans reproches ni murmures (comme disait le maréchal Soult) parce qu'il maîtriserait toute la science de son art. Cela s'appelle une monarchie éclairée.

ALSP !


Postscriptum du lundi matin : Le Premier ministre Lecornu démissionne quatorze heures seulement après la validation de son gouvernement. Le motif en est l'exacerbation des logiques partisanes qui défendent les boutiques contre l'intérêt général et répondent à l'appel aux compromis de Matignon par une promesse de censure dès demain, après le discours de politique générale au Palais Bourbon. C Q F D !

10 commentaires:

  1. Le psychodrame arrive à son terme. Macron parvient à ses fins : la destruction de nos institutions en même temps que le ruine et l'effondrement de notre pays. Le narcissisme pervers de cet homme, que nous dénonçons depuis 2017, a gagné. Lecornu jette l'éponge, Les Républicains continuent de croire qu'ils ont encore quelque chose à dire, la gauche polymorphe continue de croire qu'elle a encore quelque chose à faire et le RN de penser qu'il a la solution à tous nos malheurs ! Il est urgent que nous "les branchions aux réverbères des Champs-Elysées". En tout cas, s'il est vrai que "tout a très mal marché", nous atteignons désormais des sommets et la France est une fois de plus la risée du monde.
    Comme vous le dites aussi, "c'est à pleurer" !

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    1. J'ai trouvé tres digne l'allocution de Sébastien Lecornu ce matin, et sa dénonciation du régime des partis en cuisine particulièrement bien vue.
      L'intérêt général passera toujours après la rémunération en voix. Le système est fondamentalement en défaut.

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  2. Oups ! Il manque un mot : tout a TOUJOURS très mal marché (nous rappelait Jacques Bainville).

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  3. C'est la bonne nouvelle de cet article: Notre Kardaillac conserve charme et séduction auprès d'une gent féminine de haute tenue. Caramba, ce mélange fringuant, à la fois "Old England" et seduzione italienne, avec un soupçon de mépris aristocratique propre aux vrais Hildagos! Imparable, l'espoir subsiste car la tradition demeure. Merci Monsieur K.

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    1. j'ai oublié de signer! Camisard, bien sur!

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    2. Se non è vero, è ben trovato !

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  4. Le narcisse de l'Elysée utilise toutes les ficelles attachées à son poste sans avoir l'altitude de la fonction, comme Hollande et Sarkozy avant lui. Mais les candidats à sa succession ne sont pas meilleurs, à commencer par Retailleau.
    Ceux qui suivent la logique constitutionnelle sont placés aux extrêmes, Mélenchon et Le Pen : ils ont compris que la monarchie républicaine ne peut se réformer que par la tête.
    Les autres sont des ectoplasmes.
    René de la Molière

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    1. René, les concurrents qui se sont placés à l'autostart sont des politiciens minoritaires qui pensent que l'exercice imposera leur programme électoraliste au pays en devenant majoritaire par la victoire présidentielle.
      Il leur suffira, croient-ils, que l'algèbre combinatoire de la démocratie convoque un peu de chance et de magie à leur succès.
      On n'est pas sortis des ronces.

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    2. Nous sommes en effet coincés entre l'onirisme généralisé des uns et le narcissisme pervers de l'autre. Mais après tout qui les a élus ?... C'est là le travers et le drame de la démocratie, "le pire des régimes à l'exception de tous les autres." Reste à poser enfin la bonne question : et si l'on parlait sérieusement du roi ?

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    3. Pour "parler sérieusement du roi" dans le futur, faudrait-il encore "le" construire aujourd'hui dans l'écosystème actuel dérivant, ce qui, à ma connaissance, n'est pas lancé, sauf sur le vecteur patrimonial, peu concluant.

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