06 octobre 2024

De la dette coloniale de monsieur Faure

Non, pas Edgar le délicieux qui observait le vent tourner autour de lui, mais Olivier le secrétaire national par défaut du Parti socialiste, trou du cul de référence qui sut gâcher le quinquennat de François Hollande par l'organisation d'une fronde idéologique au risque d'emporter le parti, risque couru et achevé ! Alors que la grande affaire de l'immigration incontrôlable est à nouveau sur le tapis pour ne pas ruiner les chances de survie du cabinet Barnier, ce petit monsieur invité de Jean-Jacques Bourdin sur Sud-Radio (clic) résout le problème par l'arrêt du changement climatique, la refondation de la gouvernance africaine et le règlement de "notre" dette coloniale. S'il y a du vrai en cela, lutter contre l'émigration est une vieille rengaine de bon sens et civiliser les pouvoirs tribaux apporterait une amélioration nette, on peut raisonnablement considérer qu'en s'y mettant tout de suite, nous aurons achevé le rempart "socialiste" dans cinquante ans. Quant à la "dette coloniale", elle doit se manier avec le développement que nous avons imposé certes aux temps bénis des colonies, comme l'écrivait le professeur Savelli au président Bouteflika en 2007. Pour mémoire, voici sa lettre :

Monsieur le Président,

En brandissant l’injure du génocide de l’identité algérienne par la France, vous saviez bien que cette identité n’a jamais existé avant 1830. Monsieur Ferrat Abbas et les premiers nationalistes avouaient l’avoir cherchée en vain. Vous demandez maintenant repentance pour barbarie : vous inversez les rôles ! C’était le Maghreb ou l’Ifriqiya, de la Libye au Maroc. Les populations, d’origine phénicienne (punique), berbère (numide) et romaine, étaient, avant le VIIIe siècle, en grande partie chrétiennes (500 évêchés dont celui d’Hippone/Annaba avec saint Augustin). Ces régions agricoles étaient prospères.

◊ Faut-il oublier que les Arabes, nomades venant du Moyen Orient, récemment islamisés, ont envahi le Maghreb et converti de force, « béçif » (par l’épée), toutes ces populations. « Combattez vos ennemis dans la guerre entreprise pour la religion….Tuez vos ennemis partout où vous les trouverez » (Coran, sourate II, 186-7). Ce motif religieux était élargi par celui de faire du butin, argent, pierreries, trésor, bétail, et aussi bétail humain, ramenant par troupeaux des centaines de milliers d’esclaves berbères ; ceci légitimé par le Coran comme récompense aux combattants de la guerre sainte (XLVIII, 19, 20) .Et après quelques siècles de domination arabe islamique, il ne restait plus rien de l’ère punico romano berbère si riche, que des ruines (Abder-Rahman ibn Khaldoun el Hadrami , Histoire des Berbères,T I, p.36-37,40,45-46. 1382).
◊ Faut-il oublier aussi que les Turcs Ottomans ont envahi le Maghreb pendant trois siècles, maintenant les tribus arabes et berbères en semi esclavage, malgré la même religion, les laissant se battre entre elles et prélevant la dîme, sans rien construire en contrepartie.
◊ Faut-il oublier que ces Turcs ont développé la piraterie maritime, en utilisant leurs esclaves. Ces pirates barbaresques arraisonnaient tous les navires de commerce en Méditerranée, permettant, outre le butin, un trafic d’esclaves chrétiens, hommes, femmes et enfants. Dans l’Alger des corsaires du XVIème siècle, il y avait plus de 30000 esclaves enchaînés. D’où les tentatives de destruction de ces bases depuis Charles Quint, puis les bombardements anglais, hollandais et même américains…..Les beys d’Alger et des autres villes se maintenaient par la ruse et la force, ainsi celui de Constantine, destitué à notre venue, ayant avoué avoir fait trancher 12000 têtes pendant son règne.
◊ Faut-il oublier que l’esclavage existait en Afrique depuis des lustres et existe toujours. Les familles aisées musulmanes avaient toutes leurs esclaves africains. Les premiers esclavagistes, Monsieur le Président, étaient les négriers noirs eux-mêmes qui vendaient leurs frères aux Musulmans du Moyen Orient, aux Indes et en Afrique (du Nord surtout), des siècles avant l’apparition de la triangulaire avec les Amériques et les Antilles, ce qui n’excuse en rien cette dernière, même si les esclaves domestiques étaient souvent bien traités.
◊ Faut-il oublier qu’en 1830, les Français sont venus à Alger détruire les repaires barbaresques ottomans qui pillaient la Méditerranée, libérer les esclaves et, finalement, affranchir du joug turc les tribus arabes et berbères opprimées.
◊ Faut-il oublier qu’en 1830, il y avait à peu près 5000 Turcs, 100000 Koulouglis, 350000 Arabes et 400000 Berbères dans cette région du Maghreb où n’avait jamais existé de pays organisé depuis les Romains. Chaque tribu faisait sa loi et combattait les autres, ce que l’Empire Ottoman favorisait, divisant pour régner.
◊ Faut-il oublier qu’en 1830 les populations étaient sous-développées, soumises aux épidémies et au paludisme. Les talebs les plus évolués qui servaient de toubibs (les hakems), suivaient les recettes du grand savant « Bou Krat » (ou plutôt Hippocrate), vieilles de plus de 2000 ans. La médecine avait quand même sérieusement évolué depuis !
◊ Faut-il oublier qu’à l’inverse du génocide, ou plutôt du massacre arménien par les Turcs, du massacre amérindien par les Américains, du massacre aborigène par les Anglais et du massacre romano-berbère par les Arabes entre l’an 700 et 1500, la France a soigné, grâce à ses médecins (militaires au début puis civils) toutes les populations du Maghreb, les amenant de moins d’un million en 1830 en Algérie, à dix millions en 1962.
◊ Faut-il oublier que la France a respecté la langue arabe, l’imposant même au détriment du berbère, du tamashek et des autres dialectes, et a respecté la religion (ce que n’avaient pas fait les Arabes, forçant les berbères chrétiens à s’islamiser pour ne pas être tués, d’où le nom de « kabyle » - j’accepte).
◊ Faut-il oublier qu’en 1962 la France a laissé en Algérie, malgré des fautes graves et des injustices, une population à la démographie galopante, souvent encore trop pauvre, - il manquait du temps pour passer du moyen âge au XXème siècle - mais en bonne santé, une agriculture redevenue riche grâce aux travaux des Jardins d’Essais, des usines, des barrages, des mines, du pétrole, du gaz, des ports, des aéroports, un réseau routier et ferré, des écoles, un Institut Pasteur, des hôpitaux et une université, la poste… Il n’existait rien avant 1830. Cette mise en place d’une infrastructure durable, et le désarmement des tribus, a été capital pour l’Etat naissant de l’Algérie.
◊ Faut-il oublier que les colons français ont asséché, entre autres, les marécages palustres de la Mitidja, y laissant de nombreux morts, pour en faire la plaine la plus fertile d’Algérie, un grenier à fruits et légumes, transformée, depuis leur départ, en zone de friche industrielle.
◊ Faut-il oublier que la France a permis aux institutions de passer, progressivement, de l’état tribal à un Etat nation, et aux hommes de la sujétion à la citoyenneté en construction, de façon, il est vrai, insuffisamment rapide. Le colonialisme, ou plutôt la colonisation a projeté le Maghreb, à travers l’Algérie, dans l’ère de la mondialisation.
◊ Faut-il oublier qu’en 1962, un million d’européens ont dû quitter l’Algérie, abandonnant leurs biens pour ne pas être assassinés ou, au mieux, de devenir des habitants de seconde zone, des dhimmis, méprisés et brimés, comme dans beaucoup de pays islamisés. Il en est de même de quelques cent mille israélites dont nombre d’ancêtres s’étaient pourtant installés, là, 1000 ans avant que le premier arabe musulman ne s’y établisse. Etait-ce une guerre d’indépendance ou encore de religion ?
◊ Faut-il oublier qu’à notre départ en 1962, outre au moins 75000 Harkis, sauvagement assassinés, véritable crime contre l’humanité, et des milliers d’européens tués ou disparus, après ou avant, il est vrai, les excès de l’O.A.S, il y a eu plus de 200000 tués dans le peuple algérien qui refusait un parti unique, beaucoup plus que pendant la guerre d’Algérie. C’est cette guerre d’indépendance, avec ses cruautés et ses horreurs de part et d’autre, qui a fondé l’identité algérienne. Les hommes sont ainsi faits !

Monsieur le Président, vous savez que la France forme de bons médecins, comme de bons enseignants. Vous avez choisi, avec votre premier ministre, de vous faire soigner par mes confrères du Val de Grâce. L’un d’eux, Lucien Baudens, créa la première Ecole de médecine d’Alger en 1832, insistant pour y recevoir des élèves autochtones. Ces rappels historiques vous inciteront, peut-être, Monsieur le Président, à reconnaître que la France vous a laissé un pays riche, qu’elle a su et pu forger, grâce au travail de toutes les populations, des plus pauvres aux plus aisées - ces dernières ayant souvent connu des débuts très précaires. La France a aussi créé son nom qui a remplacé celui de Barbarie. Personne ne vous demandera de faire acte de repentance pour l’avoir laissé péricliter, mais comment expliquer que tant de vos sujets, tous les jours, quittent l’Algérie pour la France ?

En fait, le passé, diabolisé, désinformé, n’est-il pas utilisé pour permettre la mainmise d’un groupe sur le territoire algérien ?
Je présente mes respects au Président de la République, car j’honore cette fonction.

Un citoyen français,
André Savelli, le 10 décembre 2007, Professeur agrégé du Val de Grâce. (source)

Hormis dans les métropoles, les aires portuaires et sur les fuseaux routiers de et vers les aéroports, l'Afrique décolonisée est retournée à son délabrement, les émissions télévisées sur les routes de l'impossible nous le passent à l'envi. Bien sûr que les grands travaux d'infrastructure de l'époque des Blancs ont pris leur lot d'accidents du travail, les lignes ferroviaires comme celle du Yunnan ou le Congo Océan ont été construites par les mains indigènes au prix de souffrances, mais les pays colonisés ont fait un saut de développement forcé qu'ils n'auraient jamais accomplis par eux-mêmes seuls. Comme le confiait un jour le député breton Kofi Yamgnane, le Togo français de jadis disposait de routes roulantes toute l'année, d'écoles et de dispensaires jusque dans les coins les plus reculés, alors qu'aujourd'hui le développement indéniable mais mal pensé accroît la pauvreté en même temps qu'il se déploie ! La seule "dette coloniale" qui subsistait à la charnière des années 60 était peut-être l'empreinte insuffisante d'une administration autochtone qui va par la suite se tribaliser, et la vitesse d'une décolonisation laissée entre les mains d'intellectuels assis et pas d'entrepreneurs formés en nombre suffisant. Ce sont d'ailleurs les femmes africaines qui combleront ce défaut d'entreprenariat local. Une jeune génération se jette aujourd'hui dans l'aventure, mais cinquante ans ont été perdus dans la formation d'avocats, hauts fonctionnaires et tous autres conseillers sans pouvoir économique de production.

La France d'aujourd'hui n'a plus les forces suffisantes pour reprendre à son compte le nécessaire surdéveloppement de l'Afrique qui annulerait le désir d'ailleurs qui fait aujourd'hui traverser le désert et la mer aux laissés-pour-compte ; et posons-nous la question : y est-elle encore invitée ? De nouveaux satrapes ont pris les rênes du pouvoir au Sahel qui cherchent à établir leurs familles sur la bêtise humaine ; la Centrafrique, le Sénégal nous tournent le dos. Le Tchad bientôt. Ne restent que les comptoirs ouverts sur le monde qui savent peser les avantages et inconvénients de leur relation avec la France. M. Faure qui croit enfiler les perles de l'évidence, est comme tout socialiste prisonnier d'une lecture myope des réalités et surtout, de la nature profonde des ressorts psychologiques qui meuvent l'individu. Le mirage de l'herbe plus verte au nord est encore dansant sur l'horizon des peuples d'Afrique. Ce n'est pas un problème de "dette" ni d'argent.

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Postscriptum du 7 octobre 2024
Il y a un an jour pour jour mais c'était un samedi de shabbat, des Palestiniens de la Bande de Gaza perpétrèrent le grand pogrom de Be'eri et Réïm, tuant dans des conditions atroces douze cents juifs des kibboutzim au nord du Néguev. La sauvagerie, documentée par ses propres perpétrateurs et contrôlée à distance par leurs chefs, a atteint des sommets d'horreur qui ont justifié une réponse proportionnée de l'Etat hébreu au point d'origine, Gaza City. Les stigmates sanglants de cette attaque ont souillé durablement la cause palestinienne. On peut cependant réenrouler le film.
Créé à Gaza par le Shin Bet dans le but avoué de pourrir la vie de l'OLP de Yasser Arafat dans la Bande, le Hamas fut contrôlé et nourri jusqu'au bout par l'Etat israélien qui lui remettait chaque mois les contributions arabes à son administration, du Qatar surtout. Mais le monstre a échappé au bon docteur Frankenstein. Croissant en cage (trop petite) depuis des années, il a eu le temps d'observer le système de gardiennage jusqu'à péter un jour les grilles infranchissables du zoo et se jeter sur les premiers venus. Le reste est littérature.

Nos pensées vont aux victimes de l'impéritie ordinaire des orgueilleux. Que leurs âmes reposent en paix.

ALSP !

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