Ailleurs, de grands pécheurs font le Chemin de Compostelle sans garantie d'indulgences. Il est mieux avisé d'aller depuis Sumène à Notre Dame du Suc en prenant à Ganges la route de l'Hérault par Cazillac, puis de bifurquer à droite peu après l'église de Brissac (carte IGN - clic). A vélo, c'est bien. Le sanctuaire est un but de pèlerinage ou de rencontres voire de pique-niques. On n'y prétend pas rebouter les mal-foutus mais on y guérit l'âme. Les Amis du site en disent du bien :
« Notre Dame du Suc se situe dans le sud de la France au nord du département de l'Hérault, à 50 km de Montpellier et 70 km de Nîmes. Adossé au massif de la Séranne qui borde les Cévennes méridionales, le sanctuaire est sur le territoire de la commune de Brissac proche de la ville de Ganges. Il fait partie de la Paroisse Porte-des-Cévennes et du diocèse de Montpellier (antérieurement Maguelone). Cette zone très touristique, inscrite depuis Juin 2011 au Patrimoine mondial de l'Humanité se situe entre à une soixantaine de kilomètres de la mer et a une heure de voiture thermique de l'Aigoual qui règne de 1567m d'altitude sur toute la région par ses vents et ses eaux. Il se trouve à l'entrée de la magnifique vallée de la Buèges. Il est également situé à quelques kilomètres de la superbe abbaye de Saint-Guilhem-le-Désert, de la grotte des Demoiselles (Saint-Bauzille-de-Putois), de la grotte de Clamouse (Saint-Jean-de-Fos) ainsi que du cirque de Navacelles. Hors les jours de pèlerinage, la basilique n'est ouverte que les dimanches après-midi ; mais le sanctuaire et ses dépendances (terrasse, grotte de Lourdes, vierge de la montagne) sont accessibles en permanence dans la journée.»
Le Suc a été monté par les bénédictins de Brissac au VIIIe siècle, quand un berger leur rapporta une vierge d'albatre à l'enfant trouvée sur la montagne sous un dolmen. Fidèles à la pratique concurrentielle de détournement des pauvres en quête de salut, ils fondèrent un lieu de pèlerinage avec tous les à-côtés nécessaires au pénitent. L'exposition élevée mais accessible du site est caractéristique des points de rassemblement celtiques. On aurait pu fouiller ou y planter une croix d'Irlande. Mais bon !
Plus bas sur la carte, on arrive à l'abbaye décommissionnée de Gellone à Saint-Guilhem-le-désert, fondée en 804. Sans références historiques, c'est le choc. Avec un peu d'histoire, c'est plus que le choc. Internet en parle d'abondance, mais pas du Chemin.
Le Chemin de Saint-Guilhem, c'est un truc de bourgeois tout à fait bienvenus dans ce pays qui en manque. Ce sont 240 kilomètres d'une randonnée qui part de l’Aubrac (Aumont), puis les Grands Causses, les gorges du Tarn et de la Jonte, les basses Cévennes jusqu'aux portes de la Méditerranée. C'est carrément fabuleux. Une courte vidéo fait l'article avec talent et vous pouvez la regarder en cliquant ici. En passant, préférez le bâton de pèlerin à ces bâtons de ski, et méfiez-vous des vautours fauves s'ils sont nombreux à tourner au-dessus de vous comme dans Lucky Luke ! C'est là que le vrai bâton à crosse vous sera utile ; il tue n'importe qui au second moulinet.
Revenons au désert, accrochez-vous à votre bâton. L'ascendance de saint Guilhem de Gellone († 812) remonte en ligne directe aux exilarques juifs d'Irak, succédant par le sang aux exilarques de Babylone lesquels procèdent par le sang toujours des exilarques de Jérusalem dont le second, Salathiel ben Jechaniah (597AC/540AC) est le fils du 22ème roi de Juda, Jéchonias de Judée mort libre en 562AC, de la dynastie de David. Selon la Bible, il y a 18 ou 19 rois entre ce dernier et le roi David (1040AC/962AC).
C'est donc le fils du 2è exilarque juif d'Irak, fils lui-même du 34è et dernier exilarque juif de Babylone, qui débarqua à Narbonne à l'appel des bourgeois juifs de la ville à la direction de la forte communauté israélite qui rayonnait sur toute la Méditerranée occidentale par le commerce, les arts et les sciences. Il s'appellait Natronaï David (672-739).
Une thèse de 400 pages plus 30 d'appareil critique, éditée par l'Université de Columbia sous la plume d'Arthur Zuckerman en 1972 (clic) tend à prouver (plus vraisemblablement, elle veut prouver - c'est son travers) que des domaines établis le long du fleuve Atax auraient été donnés aux Juifs de Narbonne par Pépin le Bref en rémunération de leur concours à la guerre des Francs contre les Sarrazins, formant une principauté dans l'empire naissant. Zuckerman l'appelle Makhir, patronyme hébreu de Natronaï en aramaïque.
Sous la férule de Charles Martel (688-741), ce premier exilarque juif de Narbonne est marié en 705 à une noble franque, Chrodelinde d'Austrasie (678-740), de laquelle il a un fils unique, Thierri d'Autun (705-762) lequel épousera Rolinde d'Aquitaine de laquelle naîtra un fils, Théodoric le Pieux (730-793) lequel épousera une fille de Charles Martel, Alda de Francie (722-795) qui lui donnera cinq enfants "davidiens" au sein de la maison des Pippinides. Parmi eux, Guilhem de Gellone, petit-fils donc de Natronaï, mais aussi :
- 1/ Sigisbert ou Gilbert de Rouergue (750-820) qui donnera les Raimon de Toulouse ;
- 2/ le précité qui servira aussi la maison de Toulouse et les Pippinides d'Italie ; puis les Francs orientaux par Louis II le Germanique dont sa fille Ermengarde sera mariée au roi de Bourgogne, Boson V de Provence. Ils auront, après trois filles, Louis III de Provence, dit l'aveugle, empereur d'Occident. Ça trotte !
- 3/ Thierri II d'Autun (755-804) engendrera une fille unique, Alba qui engendre Bernard Ier, comte d'Auvergne et Théodoric, comte de Châlon-sur-Saône ;
- 4/ Adalelme d'Autun (760-803) ouvrira la maison de Poitiers qui se répandra au sud jusqu'en Catalogne ;
- 5/ Aube d'Autun (770-?) sans postérité.
Place maintenant aux généalogistes distingués qui nous prouveront que l'injection davidienne a touché Hugues le Grand voire son fils Capet, le premier des capétiens. Ou plus tardivement peut-être quelque scion de la race des rois, comme on l'a vu presque arriver avec Alphonse de Poitiers.
Quid de Henri IV de France, descendant de Bernard VI d'Armagnac, sire d'Albret, et de Cécile de Rodez (1278-1312) injectée par son ascendance des comtes de Rodez ? Il s'agit de douzaines de descendances à explorer, bien au-dessus de mes forces, mais à le faire au plus court, je me concentrerais sur le Vert-Galant, parce qu'il fut un grand... "disséminateur" !
Autre conséquence : connaissant la forte impatience des nobles de ce temps à se reproduire après manger, il n'est pas douteux que des dizaines de milliers de Français d'aujourd'hui soient d'ascendance davidique, sans passer par les marranes d'Espagne réfugiés chez nous.
Nous aurions pu poursuivre avec le "sang noir" de Louis XIV venu du fond des steppes arides d'Espagne par Blanche de Castille qui en aurait fait (ça se discute sérieusement) un descendant du Prophète Mahomet. Isabelle d'Orléans Bragance, épouse d'Henri l'Ancien (le liquidateur) soutenait cette thèse dans son livre "Blanche de Castille, mon aïeule". Nos rois avaient-ils des racines abrahamiques ? Les critiquer serait donc de l'antisémitisme. Bon, c'est à la mode !
Sinon, dans une semaine c'est la Saint-Louis de Sète. A ne pas manquer, grandiose !
ALSP !
Arthur J. Zuckermann a publié sa thèse sous les auspices du Center for Israel and Jewish Studies de l'université de Columbia (NYC). J'ai vérifié. Son patronyme est d'origine israélite européenne, peut-être polonaise. La belle histoire est un plaidoyer pro domo qui ne manque pas de charme, mais sollicite trop les sources croisées qui se croisent mal finalement. Son mérite est d'avoir relancé l'étude des communautés juives de la côte méditerranéenne, à la fois puissantes et riches. Cette légende du roi juif de Narbonne mériterait une étude approfondie d'un collège d'érudits moins marqués par leurs origines.
RépondreSupprimerPar contre j'accepte que le sang de l'exilarque se soit diffusé dans la seconde race des rois.
Mais finalement pour faire quoi ?
(Jim)
A mon avis il n'y avait pas d'intention politique. Charles Martel connaissait-il les psaumes du roi David ? J'ai un doute.😁
SupprimerSalut. Il s'est passé quelque chose mais je ne vois pas un maire du palais de Paris, administrateur avisé s'il en fut, tailler un fief puissant, collé à la marche d'Espagne à une communaute étrangère organisée et gouvernée par un exilarque d'orient.
RépondreSupprimerPar contre que les chefs Francs aient accepté la manifestation d'un "roi" symbolique pour les jours de fête, ça oui.
Mais la transmission du sang de David est tout à fait probable.
Je vous y disais tout le bien que j'ai pensé de votre superbe carte postale de vacances en Septimanie familiale ! D'autant qu'elle me rappelait les bons moments passés, mon épouse et moi-même, sur la Route, en Aubrac au printemps dernier. Beaucoup est dit d'ailleurs dans l'agréable vidéo de nos deux jeunes et sympathiques marcheurs ci-dessus.
RépondreSupprimerJ'ai revécu également avec plaisir la “disputatio” que nous eûmes l'an dernier sur l'ascendance davidique de beaucoup de familles importantes de notre pays dans les colonnes d'un autre blogue.
Merci, sur ce point, à Jim pour le rappel de la place d'une interaction davidique avec la Narbonnaise indépendamment de l'Espagne mais aussi... d'Arthur Zuckermann.