02 mars 2025

La mer monte, la merde aussi !

Onze cents jours que le nain maléfique bunkérisé sous le Kremlin a lancé la conquête de son voisin ukrainien. On en sait les motifs, tutorat des communautés russes menacées hors les murs, expansion de l'ogre atlantique, recouvrement des terres impériales soviétiques. De doctes sachants affirment que l'essai répondait au géodéterminisme de la Russie éternelle, ouverte à son occident sur la grande plaine d'Europe du nord qu'elle doit absolument contrôler pour rester dans le film de son histoire de résistance glorieuse. Trois ans d'horreurs, de déportation de gosses, des centaines de milliers de morts plus tard, la Russie poutinique se maintient sur le champ de ses dévastations au prix exorbitant de ses stocks d'armes et de la quasi-disparition de son industrie civile. Si le petit csar s'avère un piètre stratège, le général en chef, un piètre tacticien. L'Ukraine aurait-elle les moyens de pousser un peu plus fort en rayant la logistique russe de l'espace de guerre, que l'affaire se conclurait assez vite par la capitulation sur le terrain des unités russes démoralisées, les unes après les autres se mutinant. Mais la lame de fond d'une décolonisation de la Fédération de Russie est ce que craignent le plus les dirigeants occidentaux et la Chine populaire pour s'accorder a minima sur un tabou : il faut sauver le soldat Poutine et ses fusées atomiques ; à part de lui, le chaos mondial !

Enfin Donald Trump vint ! L'agent d'influence du Kremlin a été recruté très tôt au fil des affaires de promotion immobilière dont il fut deux fois sauvé par l'oligarchie russe résidente aux Etats-Unis, un autre nom de la mafia russe : depuis son retour aux affaires le ciel s'éclaircit pour le gangster de pissotière à l'autre bout de la corde ! C'est à ce moment que l'on mesure l'entregent, la finesse d'analyse et la navigation adroite de Volodymyr Zelenskyy qui s'est sorti du guet-apens télévisé dans le Bureau Ovale où il fut copieusement humilié par JD Vance et son mentor (toujours en retard d'une réplique d'ailleurs) sans pour autant rendre son épée. En fait il a osé réfuter l'argument de crédibilité de Poutine asséné par Trump qui imagine l'autre comme son ami pour ne pas dire son obligé. Crime de lèse-majesté envers le POTUS, patin-coufin, Zelenskyy en est sorti au contraire grandi, laissant passer les deux autres pour des singes hurleurs, en France on dirait des Hanouna. Le deal Trump-Poutine a autant de chances de succès que le mirifique contrat de développement que le premier président Trump voulait faire signer à Kim Jong-un, en oubliant que c'était sa sœur Yo-jong qui pensait à sa place, comme Nikolaï Patrouchev pour Poutine. Il faut lire ce que dit Guirkine de la séquence. L'ennemi de Zelensky croupit dans une geôle russe pour avoir dénoncé Poutine et sa clique de siloviki comme des incapables à mener une guerre conclusive contre Kiev. Guirkine - c'est le mec qui a descendu le Malaysian Airlines MH17 au-dessus du Donbass en 2014 - vient d'écrire une lettre de prison dans laquelle il affirme que :
– « Trump a tenté d’humilier Zelensky, mais s’est finalement humilié lui-même. Guirkine a également noté que les soutiens de Zelensky sont assez forts aux États-Unis et en Europe tandis que Trump n’a aucun effet de levier réel » (source bsky-WarTranslated). Le spectacle de deux gangsters vociférant dans le bureau mythique de la Maison Blanche pour reprendre le racket en voirie, les radeuses et les paris du quartier Little Ukraine de Low Manhattan, fera un scénario très prolixe en ridicule dans un prochain show du comédien revenu à la scène. Symétriquement et dans la foulée, l'Europe a compris que l'Alliance à première demande était rompue et qu'il faudrait dealer désormais tout secours américain dans le futur en cas de dégradation sévère de sa sécurité. Qu'a donné la réunion des chefs européens à Lancaster House aujourd'hui ? Deux choses (source Time) :

La France, la Grande Bretagne et l'Ukraine vont élaborer un projet d'armistice durable qu'ils porteront ensemble à Washington ; L'Europe ne rompt pas avec l'administration Trump et continuera de collaborer ; l'understatement est que l'Europe y sera impliquée pour tenir compte du transfert du souci stratégique américain vers l'Asie, transfert légitime selon M. Macron. Deuxio, on réarme et on se concerte hors de vue des pays réticents quels que soient leurs motifs. Finalement, on ne casse pas de porcelaine ; il y a déjà bien assez de débris ! Douze pays étaient présents au Royaume-Uni en soutien du président Zelensky : l'Allemagne, le Danemark, l'Italie, les Pays-Bas, la Norvège, la Pologne, l'Espagne, le Canada, la Finlande, la Suède, la Tchéquie et la Roumanie. A noter que la Turquie était présente à Lancaster House ainsi que le SG de l'OTAN. La présidente von der Leyen était là en pot de fleurs à nul effet. Pour réconforter le président ukrainien, le roi Charles III l'a reçu à Sandringham après la réunion des treize.

Qu'apprendriez-vous d'autre que vous n'auriez pas entendu ailleurs ? La force primant le droit maintenant, la voix de l'Europe ne sera entendue dans les enceintes décisionnaires que si elle est celle d'une Europe-Puissance ; l'ère diplomatique d'une Europe défenseure du droit et du monde libre est obsolète. Seul le vacarme franchira le sas de connerie américain et sera audible derrière le rempart du Kremlin. Une chose quand même :

Certains stratèges en chambre (comme votre serviteur) déroulent la thèse du nécessaire dettelage de la Chine populaire et de la Russie, laquelle risquerait de devenir la nation mandataire de la première. Ce que bien sûr Donald Trump penserait obtenir par le renforcement de la position de Vladimir Poutine en Ukraine jusqu'à capitulation d'icelle sur les bases de reddition exigées (quatre oblasts rendus à la Russie, Crimée en prime et levée de toutes les sanctions). Le cirque du Bureau Ovale s'inscrit dans cette boucle avec la captation des terres rares pour faire bon poids. Mais la Chine, friande de matières premières et de terres arables, ne fera pas l'anschluss économique d'un immense pays sous-développé à l'est de l'Oural, qui lui coûterait une fortune à équiper... pour à la fin rester à la merci de milliers de fusées, si d'aventure il plaisait au csar du jour de mourir. D'ailleurs où sont les investisseurs chinois dans les friches des implantations abandonnées par l'Occident en Russie occidentale ? Nowhere ! Quoi qu'en pensent Trump et ses affidés, les relations interétatiques sino-russes ne bougeront pas, le pacte étant de méfiance contrôlée. La flotte russe d'Extrême-Orient, facilement renforcée désormais par la route arctique, pourra même prendre le contrôle de la mer d'Okhostsk en cas de crise sino-nippone, voire emm...der la flotte américaine en Mer de Béring. A vos mappemondes !

Laissons donc les choses arriver à leur terme, comme on dit en obstétrique. Nous, Européens, ne pouvons pas infléchir les trajectoires. Il eut fallu pour ce faire que nous ayons la capacité de menacer autrui des pires outrages avant tout discours. Notre civilisation du hamac socialiste nous en retient très loin, mais la réflexion avance. Revenons à nos moutons, ceux de F'murr bien sûr. Avez-vous remarqué comment la gauche moraleuse a contourné ses déboires dans l'hémicycle où elle a échoué à renverser le gouvernement sans motifs particuliers sauf à vouloir le remplacer ? Par ses moyens d'intimidation coutumier, elle a mis sur la défensive le premier ministre dans une affaire de mœurs prescrite depuis longtemps, non pas qu'il eut été possible de l'y inculper, mais au motif filandreux qu'il aurait dû savoir et dénoncer jadis ces exactions insupportables. La presse en panne, saisit le bâton merdeux de l'opprobre comme elle vient d'en finir avec l'abbé Pierre, mort, enterré et pourri à ce jour mais qu'importe, ce sont les "principes de justice sans frontière" qui priment et le tirage. Cela va faire quelques titres racoleurs, après le sex-addict en soutane, voici le catho bourgeois indifférent aux enculades prolétariennes. Plus sérieusement ? Y a t-il plus sérieux ? Oh oui !

L'effondrement non anticipé des souches de la calotte glaciaire antarctique-ouest par subduction des eaux de fonte et de celui déjà bien avancé du Groenland mettent en perspective à l'horizon du siècle une élévation des océans très supérieure à deux mètres. Vingt mètres ? dix fois deux mètres, ce qui était l'anticipation d'acception commune jusqu'ici ? L'apocalypse ignorée jusqu'ici se discute maintenant.
Suivre l'entretien d'Eric Rignot au Greenletter Club (une heure) en cliquant ici. Vous aurez la révélation qui va bien, avant de remonter le trait de côte en bas de chez vous.

Où iront tous ces gens ? Au paradis pardi !

ALSP !

8 commentaires:

  1. "Laissons donc les choses arriver à leur terme" est effectivement la bonne expression et celle qui m'a d'ailleurs accompagné tout au long de ma carrière professionnelle ! J'en connais un rayon dans ce domaine. Le bon sens vous dis-je. Et pourtant quelle chienlit putride règne aujourd'hui dans notre beau pays...
    Heureusement, vous et moi sommes au-dessus des vingt mètres de notre futur trait de côte. Ça rassure. JYP

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  2. Blague à part, si Rignot a raison et bien que je le trouve finalement plutôt optimiste quant à nos capacités à réagir, il est clair que nous avons beaucoup de soucis à nous faire pour nos petits enfants. Et pas seulement concernant le trait de côte. Hélas, pas sûr que nous trouvions les décideurs pas plus que les organisateurs de la riposte tant le court terme semble leur seule obsession.

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  3. J'ai retenu de cet entretien c'est la "limite de fourniture" de sa prospective : 2040-2050. Au-delà on est dans la clause de style car on ne peut tenir compte des effets de la créativité humaine à contrer ce défi dans le futur. Il parle de fusion nucléaire et de colonisation de la planète Mars. Ce qui lui fait peur c'est l'augmentation géométrique de la menace.

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  4. Il ne faut pas faire l'économie du dernier article de Françoise Thom sur Desk Russie. Elle a le bagage !
    La double vengeance de Vladimir Poutine (clic).

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    1. Merci pour cette passionnante et judicieuse analyse. JYP

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  5. Mais où trouvez-vous toutes ces sources ? !!!

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  6. Et que pensez-vous du dernier spectacle du marionnettiste de l'Elysée, hier au 20 h, qui tente de mettre en place les moyens de sa résurrection ? JYP

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    1. Accaparé par la belle-famille venue de loin, je n'ai rien vu. Mais tous parlent de l'absence de crédibilité de Trump qui n'est dorénavant l'allié de personne, sauf de lui-même bien sûr !

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